angil | oulipo saliva (UR17 , 2007) |
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clip video de "Narrow Minds" par Jean Yves BERNARD |
Le tant attendu nouvel album d’Angil va en dérouter plus d’un : album concept lipogramme sans la lettre E et l’accord Mi (E en notation anglaise), musique aux confins du jazz, du hiphop et de la pop, visuels en forme de Bande Dessinée…Pas de doutes : Oulipo Saliva va faire du bruit en 2007.
Interview d'Angil pour la sortie d'Ouliposaliva avec le webzine FROOGY'S DELIGHT (Mai 2007).
Interview d'Angil en anglais pour le webzine MUSIC TOWERS (Mai 2007).
Interview d'Angil avec le magazine LONGUEUR D'ONDES (Automne 2007).
Interview d'Angil et prestation solo de quelques titres dans l'émission Minuit/dix du 17 Juillet 2007 sur RADIO FRANCE CULTURE.
Interview d'Angil dans l'émission Esprit Critique du 22 Juin 2007 sur FRANCE INTER.
A une époque pas si reculée, on ne connaissait guère qu’un moyen d’évaluer la qualité d’un groupe français : on mesurait sa capacité à digérer les influences anglo-saxonnes qui l’avaient nourri. Depuis, nombre de Frenchies se sont heureusement affranchis et ouverts. Aujourd’hui, les plus valeureux ne sont pas ceux qui réussissent à s’éloigner de l’emprise de leurs modèles, mais plutôt ceux qui, d’un projet à un autre, savent prendre leurs distances avec leur propre histoire et remanier leur langage en profondeur. De ce point de vue, le Stéphanois Mickaël Mottet, alias Angil, et les Hiddentracks, le collectif bariolé qui papillonne autour de lui, méritent tous les honneurs.
En 2004, on avait craqué pour Teaser For : Matter, où Angil sortait le songwriting de son enclos et l’envoyait paître à la frontière flottante du jazz et des musiques expérimentales. Soulevées par une turbulente section de cuivres, les chansons d’Oulipo Saliva poussent aujourd’hui ce désir de recherche et d’évasion nettement plus loin. Tractées par un singulier attelage instrumental (cordes, piano désaccordé, contrebasse, guitares, flûte, batterie, percussions, samples subliminaux), portées par une voix qui pourrait être celle d’un Robert Wyatt s’exerçant au hip-hop, elles s’arrachent définitivement de l’ornière du “rock indé”. Angil et les Hiddentracks planent ici au-dessus d’un domaine vierge, terre d’accueil du songwriting le moins moutonnier, du jazz le plus fureteur et du rap le plus exigeant. La production de Gilles Deles, tournée vers l’épure plutôt que vers l’empilage sonore, donne un surcroît de souplesse et de mobilité à un projet qui ne croule jamais sous le poids de ses ambitions. Elle retranscrit aussi l’ivresse contagieuse que Mottet et ses complices ont ressentie au moment de l’enregistrement : Oulipo Saliva est cette belle machine désirante qui, dans un même mouvement, a inventé et assouvi tous leurs fantasmes.
Mottet est un musicien comme on les aime : avant de passer à l’action, il n’hésite jamais à faire bouillir son cerveau. A la genèse d’Oulipo Saliva, il y a ainsi un gentil casse-tête posé par l’un de ses comparses, le saxophoniste Francis Bourganel. “Il y a deux ans, raconte Mottet, il m’a suggéré d’écrire un album sans la note mi – E dans la notation anglo-saxonne. A partir de là, il était naturel de penser à la contrainte de La Disparition, le roman de Pérec écrit sans un seul e. J’attendais ce genre d’accroche, j’avais besoin d’être mis au défi.”
Clin d’œil aux travaux ludiques de l’Ouvroir de Littérature Potentielle, ce deuxième album est aussi, selon Mottet, “un hommage au son de la salive de Francis lorsqu’elle passe dans le cuivre”. Poète autant que plasticien, le saxophoniste alto, souverain dans le swing comme dans la plus fine ponctuation sonore, joue un rôle central dans Oulipo Saliva. Mais il n’en est pas plus la vedette que ses nombreux camarades. Car la foule bigarrée des Hiddentracks (on y trouve des profs de musique, un pilote d’hélicoptère, un ingénieur ou un assistant social) forme un collectif égalitariste, qui fait passer le plaisir du jeu et de l’échange avant tout intérêt personnel. “On était très heureux d’enregistrer ensemble, se souvient Bourganel, c’était l’embrassade quotidienne. Chacun est venu avec ses idées. On a énormément discuté, avec beaucoup d’humilité : personne n’a voulu imposer ses vues aux autres.” Un bel exemple de démocratie participative, donc, comme le confirme le batteur Xavier Pradel : “Chaque membre des Hiddentracks peut changer la couleur des morceaux. C’est très agréable de savoir qu’on peut apporter sa propre patte.” C’est aussi dans cette polychromie inventive que se niche la beauté inclassable d’Oulipo Saliva, cette toile de maître dont on n’a pas fini d’explorer toutes les nuances.
Richard Robert
Un piano légèrement désaccordé, une compagnie de musiciens organiques jouant de cuivres, cordes et percussions (Hiddentracks), tel est l'environnement d'obédience jazz que Mickaël Mottet a choisi pour présenter ce deuxième album. Si l'on se réfère au folk souligné d'électronique qui caractérisait le très réussi Teaser For Matter (2004), le changement est radical. À l'instar du mouvement littéraire que son titre évoque (l'Ouvroir de Littérature Potentielle), Angil a observé, hum, au pied de la lettre, la contrainte périlleuse que s'était fixée l'écrivain Georges Perec – écrire une œuvre entière sans la voyelle “e” – et, de surcroît, a veillé à La Disparition totale des machines. Ennemi de la surproduction, le musicien s'est derechef appliqué à épurer la syntaxe de ses compositions en allant droit à l'essentiel, et, préférant la suspension à l'accentuation, s'est appuyé sur les silences pour mieux atteindre le nerf des choses. En route, on pense à Michael Mantler, Henry Cow, Art Bears (You Most, In Purdah) et Soul Coughing (Trying To Fit), à Alban Berg et Arnold Schoenberg, ainsi qu'au merveilleux Jazz Composer's Orchestra (Sylvia Plath, Libby And Small Ghost). Ouliposaliva est nimbé d'une ambiance de folie poétique, semblable à celle qui auréolait la plupart des travaux de tous les éminents personnages précités. Aussi satisfaisant et riche que son prédécesseur, le fait que ce nouvel opus lui soit si différent dans la forme (car le fond reste troublant) vient renforcer le sentiment que l'on tient bien en Mickaël Mottet l'un des plus originaux et créatifs auteurs de l'Hexagone. En tenant compte de son escapade vers le hip hop mutant en 2006 avec Broadway sous l'alias de The John Venture, il signe là un impeccable triptyque que beaucoup risquent de lui jalouser. Où qu'ils soient, messieurs Queneau et Perec approuvent.
Marc Gourdon •••••°
Oulipo Saliva, ambitieux deuxième album d’Angil & The Hiddentracks est à découvrir sur lesinrocks.com avec un MP3 inédit et deux titres en écoute.
Depuis la sortie de Teaser for : Matter, son premier album paru sur la structure toulousaine We Are Unique Records (anciennement Unique Records), on suit de très près les aventures du stéphanois Michael Mottet. Sous le pseudonyme d’Angil, cet activiste a réuni autour de lui une armée de musiciens prêt à en découdre avec les conventions, The Hiddentracks. Tous ensemble, ils ont façonné un univers où la musique redevient cet espace d’expérimentation ludique, où chaque défi, chaque projet remet en cause le précédent. Chez eux, rien n’est acquis, tout est sujet à prise de risque.
Teaser for : Matter présentait un collectif animé par cette même envie de bousculer les règles de la folk music, lui administrant quelques cachets d’électroniques, quelques piqûres de bruit blanc et de bandages jazzy. Un premier pas était franchi. Suite à ce coup d’essai, Angil s’est révélé être un stakhanoviste aux idées enthousiasmantes, notamment via l’élaboration de sa Hidden List : cette liste sert à la fois à soutenir le groupe, à s’en rapprocher, et à interagir avec lui. Pour 10€ par an, le souscripteur reçoit deux disques / DVD inédits par an, contenant des chansons rares, des extraits de concerts et des morceaux exclusifs.
En plus de cette activité parallèle et franchement originale, Michael Mottet s’est également rapproché de ces confrères de B R OAD WAY, originaire de St Etienne tout comme lui, pour créer le projet The John Venture, mélangeant électronique, free jazz, hip-hop et folk (conférer à l’article en lien). De ces aventures à la périphérie de son univers, Angil a étoffé sa palette musicale qu’il a mise à profit au moment de l’écriture de son deuxième album en compagnie des Hiddentracks.
Intitulé Oulipo Saliva, cet album est une drôle d’expérience. A l’origine, il a été composé à la guitare et au piano, un piano complètement désaccordé que Michaël a trouvé en bas de chez lui et s’est empressé de l’inclure dans son orchestre protéiforme. A partir des premières démos enregistrées, et avec l’aide des Hiddentracks, Angil et son collègue de toujours, Gilles Deles, ont totalement remanié cette matière première, gommant une bonne partie des guitares pour amener l’ensemble vers un ailleurs bien plus excitant. Jamais à court d’idées, Angil s’est également imposé, comme l’indique le titre de son album emprunté au mouvement Oulipo, formé par Raymond Queneau et dont dépendait Georges Perec, un album où la lettre E et l’accord de mi (« E » en anglais) serait proscrit. Chez d’autres, cette posture intello prêterait à rire ; chez Angil, elle ne fait que renforcer l’idée que ce musicien n’est pas à une surprise près.
L’écoute d’Oulipo Saliva n’est ainsi à aucun moment une épreuve pour les oreilles. Lorgnant sur le hip-hop – habitude prise avec The John Venture -, Angil fait également des œillades insistantes aux formes mouvantes du jazz. Ce fanatique de Sun Ra dirige sa petite troupe de musiciens comme Charlie Haden le faisait à l’époque du Liberation Music Orchestra, avec une réelle envie de mélanger les genres. De l’efficace Trying to fit au sublime Narrow Minds, Angil n’oublie également jamais, malgré son cahier des charges on ne peut plus complexe, de travailler ses mélodies. Coup de maître, Oulipo Saliva confirme le talent indéniable de ce musicien hors norme et se place d’emblée comme l’un des albums importants de l’année 2007.
Martin Cazenave
Derrière ces deux noms en « -il » et ces albums très différents se cachent deux francs-tireurs de la scène rock hexagonale, de fortes têtes musicales. Olivier Mellano n’est pas seulement un remarquable guitariste (il a accompagné Dominique A, Bed, Yann Tiersen), il est surtout un musicien polymorphe et ambitieux : après les compositions instrumentales de La Chair des anges, son disque publié chez Naïve Classique (voir Mouvement n° 42), et simultanément au nouvel « Acte » de son projet hip-hop Psykick Lyrikah (également sur le label nantais Idwet), il livre le troisième album de Mobiil, son duo avec Gaël Desbois. La bio cite Programme et Bashung, et c’est un raccourci acceptable : on pense en effet aux premiers à l’écoute d’Arroser la colère – mais un Programme moins radicalement éloigné de l’idiome rock malmené par Diabologum ; l’ombre du second plane sur des morceaux comme Je sais des choses sur moi ou Fennecs, hyènes et rats – mais un Bashung qui aurait invité avec Dälek ou Joy Division en studio. Car la noirceur de ce disque est aussi héritée d’influences cold wave qui transparaissent dans certains sons de guitare ou motifs de basse, dans ces rythmiques compressées qui lancinent ou enragent… On notera que ce CD contient également un album de « remiixes » sous forme d’un dossier de 15 fichiers MP3 proposant des relectures tout simplement remarquables du répertoire de Mobiil, réalisées par Robin Guthrie, Bed, Don Nino (qui publie enfin ces jours-ci Mentors, menteurs !, son album de reprises), Bikini Machine…
Angil est l’alias du Stéphanois Mickaël Mottet, aujourd’hui entouré d’un groupe à géométrie variable. Un premier album remarqué, Teaser For: Matter (dont vient de paraître la version remixée), avait rapidement conduit à le ranger parmi les plus doués de nos folksingers. Entre-temps, ses excursions – au sein notamment du projet The John Venture – ont révélé un horizon musical autrement plus vaste (en même temps qu’un don certain pour le hip hop, et une remarquable aisance en langue anglaise). Angil semble être avant tout amateur de défis – et quand on a écrit un morceau aussi parfait que le très « wyattien » No more guitars, il faut se le permettre : une attitude que ce nouvel album prend au pied de la lettre. Oulipo Saliva, publié par We Are Unique Records, s’inspirant des « techniques » de l’OuLiPo, est un album concept lipogramme, entièrement composé sans la lettre « E » (et son équivalent musical qui, en notation anglo-saxonne, correspond à l’accord de mi). Le résultat est un album qui aurait pu être publiée aussi bien chez Anticon ou FatCat ; une musique richement hybride qui, infusant le hip-hop et la folk dans quatre décennies de pop barrée, s’avère follement audacieuse. Deux albums qui démontrent, outre l’influence déterminante du hip-hop sur le rock d’aujourd’hui, que la contrainte (car pour Mobiil, chanter en français en est une, dont Mellano se sort avec les honneurs), est parfois la meilleure alliée de la liberté.
David Sanson
Il l'a fait… Ils l'ont fait ! Un album façon "La disparition". Ici pas de mi. Ni aux mots, ni aux accords. "Mi" proscrit, "E" disparu. Dur travail, pourtant parfait !
Oulipo saliva, pur produit du cranibus d'Angil, jamais frustrant, toujours hallucinant, ultra passionnant. Chansons alliant jazz façon Louis Sclavis ("You most", "Kids") à la pop hors du carcan connu, anglo-saxon compris ("In Purdah","Trying to fit" lorgnant sur un hip hop à la B R OAD WAY). Atomisation du format à tout va, inspiration hors du commun, jamais album fut si fou. Du jamais vu pour nos tympans. Instants furtifs ("Do not think"), longs opus planants ("Sylvia Plath, Libby and small ghost") tout ici fait bloc : du grand art. "Lift trip to mars", subtil flux musical inondant nos corps, fondants d'un plaisir franc, fini d'assoir Oulipo Saliva sur un divin divan tout là-haut dans un paradis pop hors du commun. Mots pointus, piano dissonant, brass band charmant, Angil & Hiddntracks ont fait fort, tous conduits par un fol amour du son. Toujours plus haut, toujours plus tordu mais jamais trop chic. Ici pas d'ayatollah du son, ni tribunal du bon goût. Du plaisir à fond, point final. Oulipo Saliva fait dans l'art pour tous ! OUF, trop bon quand il s'agit d'un album autant abouti, jouissif au plus haut point. Un album qui produira un flot d'accros illico, pour sûr ! Oulipo saliva est Etonnant, Envoutant, Epoustouflant ... UniquE !
David Didier
Un peu d'histoire de culture au préalable. Ce nouvel album d'Angil est un album lipogramme, c'est-à-dire qu'il n'utilise pas une lettre en l'occurrence à l'image de la disparition de Perec le e (beaucoup de e dans cette phrase !). Ce procédé lexicographique connu par Perec était la base de travail de l'oulipo (groupe de fondu de littérature) saliva (acronyme que je cherche encore). A peine la page John venture légèrement poussée, Angil recolle les morceaux de son inspiration et de ses aspirations, pour un disque collant plus avec ce qui le fait avancer, sur scene teaser for the matter commençait à être trop exigu pour lui. Mais comment ne pas étouffer un peu plus quand on s'impose une règle lexicale aussi dure. Angil a trouvé la réponse, en explosant les murs de la musique, en donnant au mot fusion une signification moins triviale. Articulé comme pouvait le faire les Tindersticks autour deux morceaux en épisode (un procédé de plus ?) oulipo saliva enfonce le clou à peine enfoncé sur sons of beneficts et légèrement mal traité sur matter. Angil est loin du folkeux fan de Swell que nous pouvions avoir, car à peine nous le mettions là qu'il se trouvait déjà autre part à donner au jazz par exemple le droit d'exister loin de la fumé et des costumes. Regorgeant d'instants fracturés, oulipo saliva émancipe Mickael, lui faisant sauter une à deux générations tout en gardant une fraîcheur d'esprit. A l'image de Bjork ou de Camille Angil joue avec les voix comme un instrument à part entière. De in purdah (morceau qui finira dans le top five de mon ipod) à took no drugs had no drink titre inquiétant étouffant, ébouriffant….terrifiant, en passant par trying to fit semblant sortir tout droit de ruby vroom, ce nouvel opus désoriente. Il faudra attendre kids pour retrouver une structure plus " classique " mais toujours aventureuse. Jazzy et tranquille, lift trip to mars, sylvia plath libby and small ghost, ou final list se posent comme la partie apaisée de oulipo, faisant du disque un ying et un yang. Comme dirait Experience, ce disque est pour ceux qui aiment le jazz, mais plus encore ce disque est pour les empêcheurs de tourner en rond, les gourmands, les adeptes de la chaise longue à l'envers, outre pour son inconfort mais aussi pour le plaisir de faire. Sans pause intellectuelle oulipo saliva est à l'image de son auteur au-dessus des modes et des vents directeurs. Mickael Mottet vient de réussir à marquer de son empreinte la musique d'ici, et comme un écho de citer Perec dans la disparition " ..sans jamais aboutir à l'insultant point cardinal l'horizon, l'infini où tout paraissait s'unir, où paraissait s'offrir la solution ". Mémorable….avec deux E.
Gerald De Oliveira
On sait l’homme iconoclaste, délicieusement surprenant, fantasque et généreux. Et malgré cela, Angil nous surprend encore avec ce Oulipo Saliva, bien loin de Teaser For : Matter son premier album, sommet pop-folk de l’année 2004, ou encore du captivant projet hip-hop réalisé avec BROADWAY sous le nom de The John Venture. Mickaël Mottet, de nouveau entouré et servi avec justesse par le collectif Hiddentracks, s’est imposé quelques préceptes, plutôt déroutants, mais qui, chez lui, le poussent un peu plus encore à l’excellence. Ainsi, sur cet album baptisé en référence à l’Ouvroir de Littérature Potentielle fondé en 1960 par Raymond Queneau, le stéphanois s’est lancé comme défi de ne pas utilisé la note "mi" (trop dur à jouer au saxophone !) et sans la lettre "e". Autant de contraintes exploitées à merveille, tant Oulipo Saliva transcende tout carcan. Angil a choisi une orientation périlleuse, faisant fi du format chanson, recourant à une instrumentation certes variée mais assez dépouillée (peu de rythmique, recours à l’électronique réduit au minimum, quasiment pas d’effet sur le chant). A l’exception de l’explosion sonique You Most (Third Part As Far As I Know) (morceau de bravoure jouissif en fin de parcours), ni foisonnement, ni superflu, juste les quelques notes choisies méticuleusement pour édifier des architectures en équilibre précaire. Impossible de trouver de filiation évidente à cet album qui fait le grand écart entre jazz et hip-pop. Un disque d’une cohérence inouïe, en marge de tout, sauf de l’excellence comme le morceau In Purdah, tube à tiroirs, ou encore le quasi-mystique Kids. Mickaël Mottet chante comme jamais, que ce soit dans un registre mélancolique ou plus narquois (Final List pour achever l’album sur une belle litanie de "fuck"). On savait Angil talentueux et généreux. Mais nous étions encore bien en deçà de la réalité.
Denis Frelat
On doit bien l'admettre, nous sommes passés à côté de "Tease For: Matter", le précédent album d'Angil que la presse avait encensé il y a trois ans. Du coup, nous avons véritablement découvert cet artiste atypique lors de sa collaboration avec Broadway au sein de The John Venture. Ca, c'était l'an passé, alors que Mickael Mottet de son vrai nom avait déjà commencé à plancher sur "Oulipo Saliva", un nouvel opus qu'il aurait été trop facile de ne pas affubler d'un concept, le genre de démarche qui, à elle seule, est capable de sublimer un disque.
C'est lors d'une conversation avec Francis Bourganel, saxophoniste des Hiddentracks (collectif à géométrie variable comptant une douzaine de musiciens accompagnant Angil), sur la difficulté de sortir la clé de Mi de son instrument, que l'idée germe dans la tête de notre homme de composer un album entier, en occultant cette note. L'équivalence du Mi en anglais étant le E, il pousse le concept en n'utilisant jamais cette lettre dans ses paroles (on n'a pas vraiment vérifié, mais il semblerait que quelques-uns soit parvenus à se glisser quand même...). Le ton est donné, "Oulipo Saliva" a trouvé sa voie.
Angil récupère alors un vieux piano abandonné en bas de chez lui, commence à composer, fait appel à son fidèle producteur Gilles Deles, puis réunit les Hiddentracks qui vont véritablement enrichir chacun des titres, et clairement les démarquer de ses efforts précédents. Mickael Mottet laisse ici son folk expérimental au placard (sans toutefois le fermer à clé), pour préférer un mélange d'influences jazzies ("Narrow Minds") et de couleurs hip hop déjà entrevues au sein de The John Venture ainsi qu'en live (l'excellent "Trying To Fit"), venant enrober ses chansons qu'il emmène d'une voix chaleureuse ("Kids"), parfois façon The Notwist ("In Purdah").
La personnalité musicale d'Angil étant très prononcée, il faudra du temps pour vraiment rentrer dans l'univers de ce nouveau disque qui, dans un premier temps, donne l'impression d'un enfant découvrant toutes les richesses d'un magasin de musique, touchant et testant tous les instruments à sa portée (qu'ils soient à cordes, à vent ou à percussions), pour finalement dévoiler toute sa richesse. C'est là que nos esprits, finalement encore trop formatés pour déceler un tel talent à la première écoute, s'ouvrent enfin pour devenir totalement accrocs à cette musique, et à ce personnage bien décidé à ne jamais tomber dans la facilité. La France tient là une véritable perle...
Mathieu
Angil, c'est un peu le Lars Von Trier de la musique. Le Stéphanois revient chaque fois avec un nouvel album où il étonne, se réinvente en soumettant sa musique à des contraintes. Après l'épisode John Venture (avec Broadway), Angil s'attaque à l'Oulipo. Pour mémoire L'Ouvroir de Littérature Potentielle initié par Queneau proposait de créer des nouvelles formes littéraires en y intégrant des contraintes d'ordres mathématiques. Comme une souris de laboratoire qui créerait son propre labyrinthe avec mission d'en sortir. Rendons à César, Frandol avait déjà été attiré par l'adaptation de ces procédés dans la musique pour son album Oulipop. Mais Angil, avec son esprit torturé et joueur, va plus encore loin. Il reprend le principe de Pérec dans son livre la disparition enlevant la lettre "E" de ses textes mais combine cette absence avec une autre, celle de la note mi (E en notation) sur tout l'album. Yes avait déjà un peu fait ça dans Close to The edge avec le sol. Mais les deux ensembles, dans ce qui apparaît finalement comme un album de pop (dans le sens "populaire" par opposition à un album de musique contemporaine) avec des morceaux presque grand public comme la gracile Narrow minds ou le catchy In Purdah, cela devient du quasi inédit. Ce qui est toujours remarquable, à l'instar de John Venture, c'est qu'une fois le principe connu, on l'oublie totalement pour ne plus apprécié que la musique. Il y a toujours cette petite voix qui nous rappelle en permanence que "c'est sacrément fort". La musique justement, entre Teaser for matter et Oulipo saliva, il y a une monde qui s'appelle Hiddentracks. Ce nouvel album, loin du travail de solitaire du premier, intègre carrément le groupe ; et si ce n'est pas le travail de composition, l'essentiel travail d'arrangement se fait de manière collégiale. La guitare folk a donc presque disparu (elle revient en fin de parcours sur le swell-ien Final list) au profit des cuivres, instruments cardinaux d'Oulipo saliva, qui donnent une couleur jazz à tout l'album (Charlie Haden et John Coltrane). Mais le groupe ne s'arrête pas en si bon chemin, témoignant encore une fois de son envie de décloisonner un peu. Angil chante bien comme un vrai songwriter folk avec sa voix fragile touchante ; il ne slame jamais même s'il accentue le rythme et accélère le flot notamment sur Trying to fit ; d'ailleurs l'influence du hip hop se ressent partout dans le travail rythmique et l'usage des boucles. Oulipo Saliva est aussi bâti sur des cordes en attente, à l'abri du vent mais prêtent à vous sauter à la gorge (In purdah avec des arrangements proches de ceux pratiqués par Brodsky quartet). Il peut-être aussi électrique et totalement free sur le larvé puis dissonant You most (avec un petit côté Tuxedomoon). L'album se déguste sur tous ces niveaux de lecture, subtil équilibre entre les différentes pistes d'enregistrement et sa riche instrumentation. Jusqu'où ira Angil pour son prochain album ? Plus loin sans doute. Mais en attendant, on jubile !
Denis Zorgniotti
Découvert il y a trois ans avec le brillant "Teaser for: Matter", le Stéphanois Angil revient avec un album ambitieux dans la lignée de "The John Venture". Réputé pour ses talents de compositeur capable de faire se télescoper avec aisance les mélodies et les univers, Angil nous offre ici un album lipogramme, sur le modèle de "La Disparition" de Perec et des travaux de l’OuLiPo. Non seulement les textes – en anglais – ont été écrits sans utiliser la lettre "E", mais la note mi (notée justement "E" en anglais) a également été proscrite. Mickaël Mottet a toujours adoré le mélange des genres (pop, jazz, rock, musique de films et hip hop), un procédé qui s’avère souvent périlleux, tant rivaliser avec des artistes adeptes du genre (tel "In a Bar Under the Sea" de dEUS) relève, en règle générale, d’une confiance en soi proche de l’inconscience.
Ici, c’est juste sublime. Le phrasé, le débit du chant pourraient faire penser à Madness ou à Day One, mais la construction des morceaux, elle, demeure très complexe sans être pesante.
En gros, il y a du travail, ça se sent, mais c’est tellement maîtrisé que l'on ne retiendra que la qualité de ces mélodies, fines et entêtantes. Un piano parfois volontairement désaccordé, un saxophone oscillant entre bonne humeur et énervement salutaire et divers instruments (violons, flûtes, percussions…) au service d’une voix qui sait vous emmener dans une douce rêverie entrecoupée de quelques cauchemars. Bref, j’aime.
Xavier
Découvert par la grâce – c’est le mot – de son premier album, le remarquable Teaser for: matter, Mickaël Mottet aka Angil remet le couvert trois années plus tard. Hommage à La Disparition, le fameux roman de Georges Perec écrit sans la lettre "E", et au collectif OULIPO (l’Ouvroir de la Littérature Potentielle) fondé par Raymond Queneau, son disque fait honneur à la réputation d’excellence du label (We Are) Unique Records.
Deuxième album d’Angil (le troisième si l’on tient compte de The John Venture, l’ambitieux - et réussi - projet de Mickaël Mottet et de B R OAD WAY), Oulipo Saliva trouve son origine dans une remarque de Francis Bourganel, le saxophoniste des Hiddentracks, qui trouvait la clé de Mi difficile pour un saxophone alto. Relevant le pari, Angil compose alors son nouvel opus en omettant la note Mi et, pour que les textes fassent bonne mesure, écrit tous les textes en se passant de la lettre E (soit la note Mi en annotation anglaise). Ce procédé lipogramme, que d’aucuns estimeront gratuit, voire superfétatoire, ne pèse heureusement d’aucun poids sur la faconde de l’album, empreint d’une profonde originalité orchestrale (cuivres et bois au menu) et d’un sens du second degré digne des Herman Düne, le genre mis à part. Le phrasé de Mottet, un spoken word aux influences ska et hip hop, sert – selon sa désormais bonne habitude – un sens du flow et de la mélodie hors du commun, où l’humour prend tout son sens. Devant une telle profusion de bonnes idées (un coup de saxo par ici, une fanfare de poivrots par là), difficile de mettre en avant un titre plus qu’un autre, tant chaque morceau (et il y en a quatorze) se démarque de son prédécesseur par d’infinies trouvailles. Désormais rebaptisé We Are Unique Records pour cause d’homonymie, le label de Melatonine et Half Asleep est toujours en aussi grande forme, ses artistes aussi. Merci pour eux.
Fabrice Vanoverberg
Si Hoepffner est le secret le mieux gardé de la scène Toulousaine, Angil était jusqu'il y a pas si longtemps le secret le mieux gardé de la scène Française. Ce disque est magnifique, audacieux, et force le respect. Espérons qu'il puisse sortir du milieu trop fermé des mélomanes curieux.
Le nouvel opus d'Angil & the Hiddentracks a pour postulat de ne contenir aucun E dans les textes, ni d’accord Mi dans la musique (noté E en anglais), un album lipogramme. OULIPO SALIVA est une nouvelle plongée sans limites dans le monde surréaliste d'Angil. Le piano est la base de nombreux titres, un vieil instrument désaccordé qui participe à l'architecture onirique des compositions . On retrouve également les cuivres tour à tour lancinants, plaintifs du jazz au hip hop en passant par la folk. Un univers aux influences mutiples que la pochette signée du dessinateur Guillaume Long vient souligner. On pourrait s'imaginer difficile l'accès à cette dimension parallèle mais c'est sans compter sur l'habilité d'Angil et de ses Hiddentracks pour vous perdre dans leurs errances musicales avant de vous saisir par un thème martelé et lancinant. Un album vraiment magnifique, issu d'une démarche imaginative et novatrice, que la Ferarock vous conseille vivement!
Auteur d'un disque aux exhalaisons folk remarqué (Teaser for Matter, grand cru de 2004), Angil revient en cette année 2007 avec un nouvel album qui fait la synthèse de ces trois années occupées à multiplier les projets : The John Venture, projet electro-folk-hip-hop mené en compagnie de BR OAD WAY (dont on a bien l'intention de vous causer dans ces pages), des collaborations du côté de chez Anticon (plus particulièrement Jel et son abstract-hip-hop) ou de l'electro-pop assombri de Laudanum...
A man (not) called E
Résultat, en arpentant ces chemins de traverse et en croisant quelques inspirateurs de son art (le petit génie Conor Oberst, plus connu sous le nom de Bright Eyes, Why?...), le frenchy et ses Hiddntracks (un collectif d'une douzaine de musiciens) ont peaufiné un opus trouble et inventif, une nouvelle réussite au tableau de chasse d'un songwriter ludique et soigneux. Joueur, Mickaël Mottet l'est via le postulat qui fonde Ouliposaliva. Suite à une remarque comme une autre de son saxophoniste, il décide de composer ce disque sans utiliser la note Mi. Et comme le bonhomme a le goût du défi, il décide d'écrire le tout sans la lettre E, puisque dans le système anglo-saxon, il s'agit du nom de cette note. Faisant fi de l'hommage à l'Ouvroir de Littérature Potentielle de Queneau et La Disparition de Perec, les persifleurs taxeront volontiers le musicien d'intello. Ce serait oublier l'originalité de sa musique, qui hybride les styles avec élégance, personnalité et sensibilité : collages vocaux (école Camille, sans le grain de folie mais avec l'âme grise) pour le sublime In Purdah, instrumentations jazzy sans masturbation ni balai dans le rectum, hip-hop dissonant aux cuivres solitaires et à la batterie sèche (Trying To Fit), duo paisiblement planant (Lift Trip To Mars, par endroits perturbé par un piano angoissé)...
Comme pour mieux brouiller les repères, on trouve également deux titres découpés en épisodes, à savoir Do Not Think, dont la fanfare bricolée pourrait accompagner dignement un enterrement (comme cela se fait, de façon plus orchestrale, à la Nouvelle-Orléans, en lieu et place d'un sinistre requiem), et You Most, composition aride qui oscille entre free malade, bruitisme expérimental et comptine « gloomy » (le mot sombre manque de malice). Quelque soit le procédé, Angil évite à chaque fois la crevasse arty qui jouxte ses pas, ses arrangements mesurés préférant l'atmosphère et le sens du détail à la prétention déplacée qui anime bien des concept-albums. D'où la présence de ce piano désaccordé qui ferait hurler plus d'un rigoriste. C'est sans doute ce qui lui permet, sur Final List, de déclamer d'amples « fuck you » sans que l'on y trouve à redire, bien au contraire.
Cerise sur le gâteau, l'album est illustré en long et large par les dessins griffonnés de Guillaume Long, auteur d'Anatomie de l'Eponge. Avouez que ce serait dommage de le pirater. Occasionnellement difficile d'accès, Ouliposaliva est en tout cas un disque passionnant, qui vient s'ajouter aux nombreuses pépites éditées par le label We Are Unique Records (anciennement Unique Records tout court).
Zdenek
Angil est certainement l'un des électrons libres les plus talentueux de notre chère scène hexagonale. Après avoir livré un premier opus prometteur (Teaser for a matter), après avoir tenté (et réussi, tant qu'à faire) l'aventure The John Venture, le bonhomme revient sur le devant de la scène avec ses Hiddentracks, et prouve (si besoin est) que le talent et l'originalité, ça le connaît.
Oulipo Saliva, tel est donc le nom de la galette en question. Pour information, cet album est basé sur une figure de style appelée lipogramme (dont, soit dit en passant, je n'avais jamais entendu parler jusqu'à lors), qui consiste à ne jamais utiliser une lettre dans la construction syntaxique. En l'occurence, le E. Et, tant qu'à faire, Angil a aussi retiré la note Mi de ses compositions (notée E en anglais). Si l'idée peut paraître saugrenue de prime abord, et laisser présager des paroles bien maigrichonnes, Mickaël Mottet surprend une fois encore : Oulipo Saliva n'est pas un simple album concept un peu délirant, mais un opus extrêmement riche, encore plus renforcé par cette approche stylistique. Côté musique, s'essayer à décrire les compositions de Oulipo Saliva reviendrait à essayer de couper de l'acier avec un couteau à beurre. Essayons, donc. Depuis Teaser for a matter, la patte Angil est reconnaissable, avec cette envie de construction/destruction et cette recherche quasi incessante de la rupture. Oulipo Saliva oscille entre cuivres légèrement bluesy/jazzy, des cordes peu académiques mais diablement prenantes (In Purdah) se heurtant à un phrasé dynamique et captivant, fleurtant parfois avec le hip hop (Trying to fit). Et délicieusement décalé.
Avec Oulipo Saliva, Angil (aidé de ses Hiddentracks) franchit un palier supplémentaire et livre un album d'un autre monde, que même la redondance (quasi obligée) des textes ne saurait entâcher ne serait-ce qu'un peu. La conclusion de cette chronique se doit de respecter l'exercice de style auquel se sont prêtés ces jeunes gens : Oulipo Saliva, du grand art ! Bravo.
Anthony
Tout en anglais. Vous devez comprendre la langue de Leonard Cohen ou Bob Dylan, des Rolling Stones ou Stevie Wonder pour pouvoir suivre l'histoire que l'on vous raconte. La musique est douce et variée, variée dans le doux, du moelleux à la toile de jute, du velours au madras. Et le voyage se poursuit de purdah en bouddhisme et en drogue. Voyage qui n'en finit pas de chercher des pots, ou du « pot », pour y faire leur bonne soupe musicale qui parfois s'enraye volontairement et recherche alors un pot d'échappement. Mais comment échapper à ce goût doux et sucré de la canne douce, ce kani-bosm dont Moïse faisait son Saint Chrême. Et la musique qui s'enraye à nouveau dans un paradis indien qui n'a rien de bouddhiste sauf à croire que la contemplation ombilicale de son propre néant est une voie vers le nirvana. Pourtant la voix de cet Angil pourrait nous faire penser à celle de quelque sirène mâle qui veut nous charmer dans le royaume des mots dans lequel « you just passed away », dans lequel vous venez de trépasser. Piano et autre saxophone tentent de nous faire chuter dans un miroir aux alouettes. Mais définitivement arrêtez de penser et jouissez de cette liqueur sirupeuse qui peut devenir obsessionnelle comme une tête qui s'écrase contre un mur plus épais que la sottise du monde. Et on peut toujours essayer de « fit », mais il n'y a ni « fit », ni « fix », ni « flip », ni « fox », ni quoi que ce soit d'autre que des « hits » comme autant de coups de marteau sur la tête qui seraient si bons s'ils s'arrêtaient, mais ils ne s'arrêteront jamais car la société prend son pied à triturer la patience des mollusques sociaux. Et on ne doit pas penser qu'ils disent si bien que cela résonne comme une sombre coulée vers le fond pour y survivre noyé à la surface de Mars : de « think » à « sink », il n'y a que la pas d'une dentale. But why on the bloody berth of fucking shit you have to suck and swallow to the last drop are these Stephanese singing and writing in English. To hide their tracks I guess, to lead us to a passage to India that will end in Hades. Inclassables disent certains. Oh que si. Mais la classe n'a plus de moule. Il a été jeté avec l'eau du bain quand on a remplacé les Beatles par les surfants Beach Boys ou les Chippendales exhibitionnistes. We are just back from the USSR, or maybe to the USSR.
Dr Jacques COULARDEAU, Université Paris Dauphine & Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Angil aka Mickaël Mottet, stéphanois de 28 ans déteste la répétition. Remarqué en 2004 avec "Teaser for matter" puis via le projet The John Venture, il oriente ici son folk toujours teinté d'abstract hip-hop ("Trying to fit") vers le jazz en étoffant de cuivres son groupe The Hiddntracks (l'exaltant tryptique "You Most"). On retrouve aussi des sons de vynils, des chœurs, des cordes et cette voix douce assez à l'aise avec Shakespeare et sa bande pour se permettre des lipogrammes en E.
Le rapport de la liberté à la règle, Georges Perec ou l’ouvroir de littérature potentielle… De mauvais souvenirs refont surface ? Sans le « e » c’est du déjà vu ; qu’à cela ne tienne, Angil éludera en plus le « mi », les « mi », tant ceux du solfège que de la phonétique. Comme dans le jargon pictural, Angil fait des séries. Musicales, celles-ci ; « Do not think » part I, part II, et part III s’immiscent avec une ingénue furtivité entre les pistes. Comme dans le nouveau réalisme, Angil frise la performance, acoustique ou temporelle. Spécimen, « Oulipo saliva » est un étrange et délicieux dosage de cuivres extraits de leur jazz band (« Took no drugs, had no drink »), de pop hors des carcans qui la définissent usuellement (« In purdah »), de rythmique hip hop (« Trying to fit »), d’interminables ambiances évanescentes aussi (« Final list »). À la limite de l’expérimental, Angil ne joue pas pour autant le jeu de l’élitisme, et propose un album proprement hallucinant. De quoi définitivement revisiter les cours de lettres modernes.
Laurence Masing
avevo sempre pensato che comprandomi l’anno scorso i cd dei schneider tm e dei final fantasy mi fossi guadagnato il mio posto tra coloro che ascoltano musica così trendy che non la conosce nessuno e invece qualche giorno fa ho scoperto “oulipo saliva” di tal ‘angil + hiddentracks’ che si colloca perfettamente accanto agli altri due con un disco che difficilmente riuscirò a togliere dal piatto, si fa per dire sono tutti mp3. l’unico neo di questo disco sono le reclame: infatti il disco l’ho scoperto andavo avanti e indietro per http://www.we7.com l’idea che sta dietro a questo sito è quella di vendere musica un po’ come l’itunes music store, ma in più permette di scaricare gratuitamente qualsiasi album, solo che prima di ogni brano c’è qualche secondo di pubblicità.
il catalogo è interessante, in pratica c’è l’ultimo album dei simple minds fatto nel 2005, c’è un live di morrisey, i primi album dei tangerine dream, l’ultimo dei charlatans uk, insomma i rami secchissimi della produzione (tipo quella roba che nei negozi di cd usati mette radici e dopo un po’ fa parte della storia del negozio stesso e al negoziante fa anche dispiacere venderla, anche perché il prezzo non è mai stato rivalutato e ora costa tipo due euro) accanto a roba del tutto sconosciuta, ma appunto in mezzo c’era anche questo angil che è davvero fico fico.
e nello scrivere che angil è fico fico mi rendo conto di non aver mai parlato di final fantasy, e dei loro album he poos clouds. lo riassumo in: ragazzo omosessuale canadese + violino + momenti di genio o quasi ma tutto sommato accessibilissimi, e roba fichetta. scarpe.
per dire, nello stesso tempo ho anche comperato l’ultimo di suzanne vega e di prince e mi hanno talmente colpito che non so neppure dove siano i cd in questo momento. per prince la cosa mi fa anche piacere: mentre ascoltavo il cd mi chiedevo, ma perché, ma perché sto ascoltando questa merdetta e poi mi è venuto in mente: un tempo questo ragazzino era anche lui un fico, poi ha fatto i soldi, ma li ha fatti male o gli hanno fatto male, forse erano troppi vallo a sapere.
ecco un difetto vero di angil è che nell’ultima canzone urla fuck fuck fuck fuck fuck, eccetera nella stessa maniera identica in cui la tipa dei dresden dolls urlava sing sing sing sing sing, una casualità cretina ma ogni volta che lo ascolto ho questo deja-vu.
sempre meglio del penultimo di battiato che quando diceva: dovremo attraversareeee per forzaaa, la portaaaa dello spavento, supreeeemo mi mettevo a ridere e dicevo si vabbé franco ma vaffanculo eh.
oh niente di personale eh
Alors que Turzi propose des chansons qui commencent toutes par la lettre A, Angil reprend le procédé du romancier George Perec : il a banni le E des paroles de son dernier album. C’est cette référence à l’oulipo (ouvroir de littérature potentielle) qu’on retrouve dans le titre de cet album. Mais le plus intéressant dans son album, c’est qu’avec son groupe The Hiddentracks, il marie le souffle du jazz et l’écriture pop... Ainsi le Stéphanois Mickaël Mottet crée l’oumupo : ouvroir de musique potentielle, qu’on pourrait même appeler "oumupop", c’est à dire une musique décomplexée des influences anglo-saxonnes parfois pesantes, et pesantes pour une raison simple : c’est aux USA qu’est né le rock, et côté européen en Grande Bretagne qu’il a donné ses plus beaux fruits, la France se contentant pendant quarante ans au moins des pâles copies, du yéyé à Téléphone. Aussi Mottet et Turzi se rejoignent sur un point : on peut être européen et faire du rock européen.
Pour son second essai, Mickaël Mottet, alias Angil, s’est entouré d’une formation classique, voire jazzy (les Hidden Tracks). On passe donc d’un univers folk balayé de légers courants électroniques (« Teaser for Matter », en 2004) à une orchestration miniature où se bousculent cordes, cuivres et percussions. C’est inattendu mais pas désagréable. Parfois pourtant, l’univers poétique d’Angil se perd dans des forêts de complexité, des détours obscurs, compliquant inutilement l’intelligibilité de cette œuvre aboutie. Sur « Ouliposaliva », Angil flirte avec les styles sans jamais se borner aux rituels d’usage. La pop de « Liftripto Mars » se voit ainsi sabotée par un piano désarticulé, le hip-hop façon Beck sous morphine (« Trying to fit ») balance son énergie sous les clairons d’un trombone à coulisse. « Ouliposaliva » se veut hommage contracté : au célèbre roman de Georges Perec (« La Disparition ») et au collectif ‘Oulipo’ de Raymond Quenaud. On salue ici le travail d’un artisan, tisserand de perles sauvages, véritablement inclassables.
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